Préserver les droits de base!
La loi fédérale sur le renseignement (LRens) doit être révisée et les services de renseignement obtenir de nouveaux pouvoirs de surveillance. Nous nous opposons à la révision de la loi avec d’autres ONG suisses. Pour la coordination et la campagne, nous avons pu récolter 15’357.20 francs. Un grand merci pour cela!
Nous avons tous des secrets et le droit de les protéger. Le respect de notre vie privée et familiale, de notre domicile et de notre correspondance est protégé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et par l’article 13 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse. Depuis au moins 2017, le trafic internet de nous toutes et tous est massivement lu, analysé et stocké pour des analyses ultérieures par l’armée suisse et les services de renseignement, au moyen de la soi-disant exploration du réseau câblé. Il est constamment souligné que l’exploration du réseau câblé est un moyen de renseignement extérieur. Cependant, comme la grande majorité des communications internet en Suisse passent par des serveurs et des réseaux étrangers, nous sommes toutes et tous concernés par cette surveillance.
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Faire reculer la surveillance
En 2022 déjà, le Conseil fédéral voulait, avec la révision de la loi sur les services de renseignement (LRens), permettre au Service de renseignement de la Confédération (SRC) de surveiller dans des conditions facilitées plus de groupes de personnes en utilisant de nouvelles méthodes. Après avoir recueilli 1’200 pages de réponses à la consultation, le Conseil fédéral a repoussé le projet aux calendes grecques. Fin 2023, il a de nouveau annoncé une consultation supplémentaire. Le projet de loi et le message devraient donc être transmis au Parlement en 2025. Un regroupement de la société civile sous l’égide de la Plateforme des ONG suisses pour les droits humains auquel appartiennent Amnesty International Suisse, les Juristes démocrates suisses, la Société numérique, droitsfondamentaux.ch et Public Eye, suit de près les événements et se prépare à repousser cette nouvelle attaque contre nos libertés fondamentales.
Le 19 mars 2024, nous avons remis, avec Campax, une pétition pour l’abolition de l’exploration du réseau câblé, avec 10’000 signatures. Depuis 2021, un recours contre cette forme de surveillance de masse est également en suspens devant le Tribunal administratif fédéral. Début 2024, trois modifications d’ordonnances sur la surveillance des télécommunications sont également entrées en vigueur, selon lesquelles des applications comme Whatsapp, Threema ou Signal auraient initialement dû être obligées de supprimer le chiffrement pour garantir la confidentialité des messages. Le Conseil fédéral y renonce – pour l’instant – en raison des critiques massives lors de la consultation.
Pour contenir l’appétit de surveillance des données, il faut beaucoup d’heures de travail, la plupart du temps bénévole. Pour leur coordination, les organisations réunies dans le groupe de travail Révision de la loi sur les services de renseignement de la plateforme des ONG suisses pour les droits humains ont engagé une personne à 20%. Pour sa rémunération et les frais de fonctionnement jusqu’à fin 2025, un peu plus de 60’000 francs ont été budgétés. Il manque actuellement 17’500 francs, auxquels s’ajoutent 2’500 francs pour cette campagne, soit un total de 20 000 francs dont nous avons urgemment besoin. Car les plans du Conseil fédéral et du Services de renseignement vont bien au-delà de ce qui a été «réalisé» jusqu’à présent.
Contourner le secret professionnel?
Grâce à des enquêtes médiatiques menées au niveau international, nous savons que le service Cyber de l’armée suisse utilise depuis un certain temps des «chevaux de Troie d’État» (logiciels espions). Au cours des trois dernières années, des journalistes et des juristes ont déposé plusieurs demandes en vertu de la loi sur la transparence (LTrans), dans le but de faire la lumière sur l’acquisition et l’utilisation de logiciels espions par la Confédération. Jusqu’à présent, Fedpol et les services de renseignement ont rejeté toutes ces demandes.
En 2022, les services de renseignement voulaient que la protection absolue du secret professionnel soit assouplie: à l’avenir, les instances religieuses, les juristes et les journalistes pourraient être surveillés ou espionnés, non seulement si ces personnes représentent eux-mêmes une menace, mais aussi si elles sont en contact avec une personne soupçonnée par le SRC.
Collecter d’abord, vérifier ensuite?
Actuellement, le SRC est soumis à des limites dans la collecte de données: il ne peut pas collecter et traiter «d’informations sur l’activité politique et l’exercice de la liberté d’opinion, de réunion ou d’association en Suisse», sauf s’il existe des «indices concrets» que ces droits sont exercés «pour préparer ou mener des activités terroristes, d’espionnage ou d’extrémisme violent».
Désormais, les services de renseignement devraient également être autorisés à collecter sans restriction des informations sur l’exercice des droits politiques en tant que «données brutes». Ce n’est qu’ensuite que ces données, en partie collectées à partir de sources accessibles au public, devraient être examinées pour vérifier si leur collecte était justifiée. Tout appel public à des manifestations, événements politiques, réunions ou activités spontanées pourrait ainsi être enregistré dans un premier temps.
Développer les exercices d’«inquisition»?
Aujourd’hui déjà, le service secret collecte systématiquement et illégalement des données sur des personnes et des organisations qui ne sont ni violentes ni extrémistes. En 2019 déjà, le Parlement a constaté que le SRC collectait et traitait des informations sur l’activité politique et sur l’exercice de la liberté d’opinion, de réunion ou d’association en contradiction avec les prescriptions légales. Au lieu d’y mettre un terme de manière efficace, la Confédération envisage maintenant d’autoriser également des mesures d’acquisition dites soumises à autorisation (également pour l’observation de «l’extrémisme violent»), , à savoir :
- la surveillance de la correspondance postal et et des télécommunications;
- l’utilisation d’IMSI-catchers;
- l’utilisation de mouchards;
- l’utilisation de «chevaux de Troie» étatiques;
- l’intrusion dans des systèmes et des réseaux informatiques;
- la perquisition de locaux et la fouillle de véhicules ou de conteneurs.
Supprimer les contrôles?
De plus, le contrôle judiciaire et celui du Conseil fédéral devraient être affaiblis: une prolongation de mesures soumises à autorisation ne serait plus obligatoirement approuvée par l’ensemble de la Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité, mais seulement à posteriori par le Tribunal administratif fédéral (TAF). Le SRC pourrait donc continuer à surveiller des personnes et des organisations quasiment sans autorisation entre la fin de la décision d’approbation en cours et la nouvelle décision du TAF. L’information a posteriori des personnes sous surveillance devrait en outre être facilitée et pourrait être reportée plus longtemps, voire même la possibilité d’y renoncer complètement. Les personnes sous surveillance seraient ainsi privées de toute possibilité de recours.Les personnes sous surveillance se verraient ainsi privées de toute possibilité de recours.
Refuser de fournir des informations, les limiter, les différer?
Aujourd’hui déjà, la pratique du Service de renseignement de la Confédération (SRC) en matière d’information est manque de transparence, insuffisante et plutôt arbitraire. Souvent, il ne donne qu’un accès limité à une liste des entrées qu’il a lui-même constituée. Les documents correspondants ne sont pas fournis, rendant impossible toute vérification sur l’exhaustivité des informations communiquées. La loi prévoit que l’information doit être fournie dans un délai de 30 jours, mais les services de renseignement prennent généralement près d’un an – et ne donnent alors accès qu’aux entrées antérieures à la date de réception de la demande, soit à des informations datant de plus d’un an.
Au lieu de rendre la pratique en matière d’information plus transparente et de la simplifier, il est prévu de supprimer complètement la possibilité de recours via le tribunal administratif pour certaines informations et communications (refus, limitation ou ajournement d’informations), ce qui est contraire à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et à la Constitution fédérale Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la protection des données, on considère déjà que les organisations n’ont plus de droit de recours, encore moins les alliances informelles. Par conséquent, le droit d’accès dans la loi sur la protection des données (LPD) ne devrait pas seulement être clarifié, mais étendu.
Traiter des données biométriques?
L’Autorité de surveillance indépendante du Service de renseignement de la Confédération (AS-Rens) a révélé dans son rapport d’activités 2021 que le service de renseigenement utilisait un système de reconnaissance faciale et traitait des données biométriques. Ce système permettrait de créer des profils d’images et de les enrichir d’autres données. l’AS-Rens y voit la création de profils de la personnalité. En se référant à la loi sur la transparence (LTrans), Société numérique a donc demandé à consulter l’analyse des bases légales et le règlement de traitement établis par le service de renseignement. Le service renseignement a toutefois refusé ce droit de regard, ce qui nous a conduits à déposer un recours auprès du TAF. La décision est actuellement encore en suspens.
Selon la nouvelle loi sur la protection des données (LPD), les données biométriques sont considérées comme des données personnelles sensibles. Elles ne peuvent être traitées par des services publics que s’il existe une base légale claire à cet effet: la mesure doit être proportionnée et permettre aux personnes concernées de savoir dans quelles conditions et par quels actes elles peuvent être concernées par des mesures de surveillance étatiques. Une telle base légale n’existe pas actuellement dans la LPD et n’est pas prévue dans la révision à venir. Le simple fait qu’une analyse des bases juridiques soit nécessaire montre en soi qu’il n’existe pas de base juridique suffisamment claire pour la reconnaissance faciale. Toutefois, toutes les personnes qui se trouvent en Suisse sont concernées par la reconnaissance faciale.